1. Où et comment un expatrié français peut-il rédiger son testament ?
Lorsqu’on vit à l’étranger en tant que citoyen français, la question de la rédaction du testament doit être abordée avec méthode. Le choix du lieu et de la forme dépend principalement de la position du pays de résidence vis-à-vis de certaines conventions internationales. En pratique, trois grandes catégories de pays existent, et chacune implique une stratégie différente.
1.1 Les pays ayant adhéré à la Convention de La Haye de 1961
De nombreux pays (42 au total) — parmi lesquels on trouve l’Allemagne, l’Angleterre, l’Australie, la Belgique, la Chine, l’Espagne, le Portugal ou encore la Suisse — sont signataires de la Convention de La Haye du 5 octobre 1961, relative aux conflits de lois en matière de forme des dispositions testamentaires. Cette convention prévoit que tout testament est reconnu comme valide dès lors qu’il respecte les règles de forme de l’un des pays concernés, y compris celles du pays dans lequel il a été rédigé.
La France, en tant que partie à cette Convention, accepte donc les testaments établis selon la législation d’un pays tiers signataire. Si l’expatrié réside dans l’un de ces pays, il est alors judicieux d’opter pour une rédaction conforme au droit français. Cela garantit la reconnaissance du testament dans le pays de résidence comme en France.
Dans un tel cas, vous pourrez :
- Soit en préférance rédiger en France votre testament sous l’une des formes autorisées en France.
Quatre principaux types de testaments sont admis en France :
- Le testament olographe : rédigé entièrement à la main par le testateur, il est simple mais peut être contesté s’il ne respecte pas les exigences formelles. Il doit être écrit de la main du testateur, daté et signé par lui.
• Le testament authentique : rédigé devant un notaire et deux témoins, il offre une sécurité juridique accrue.
• Le testament mystique : remis sous pli cacheté à un notaire, il garantit la confidentialité du contenu tout en assurant une authentification légale.
• Le testament international : rédigé devant un notaire et deux témoins, il offre une sécurité renforcée dans un cadre international. Il peut être écrit dans n’importe quelle langue.
- Soit rédiger votre testament à l’étranger, dans votre pays de résidence ayant adhéré à la Convention de La Haye de 1961. Votre testament sera établi sous la forme applicable dans ce pays. Il vous faudra consulter un juriste local pour obtenir des conseils sur les formes à respecter afin que votre testament soit valable selon les règles locales.
- Soit opter pour des testaments multiples. Certains préfèrent établir un testament spécifique à chaque pays où ils détiennent des biens. Cette approche exige une coordination rigoureuse pour éviter toute contradiction entre les deux documents. Il faudra veiller, dans un tel cas, à confirmer votre testament rédigé à l’étranger (et vice versa) et à ne pas révoquer ces dispositions lors de la rédaction du deuxième testament.
Attention : si vous insérez la formule « Je révoque toutes dispositions antérieures à ce jour », seul le dernier testament écrit dans l’un des deux pays serait applicable.
1.2 Les pays ayant ratifié la Convention de Washington de 1973
Dans le cas où le pays de résidence n’a pas ratifié la Convention de La Haye, il convient de vérifier son adhésion à la Convention de Washington du 26 octobre 1973. Cette convention, officiellement intitulée Convention portant loi uniforme sur la forme d’un testament international, a été élaborée pour créer une forme de testament reconnue internationalement, facilitant ainsi les successions transfrontalières. Grâce à cette norme, un testament international peut être reconnu dans les pays signataires, peu importe le lieu de rédaction, la nationalité ou le domicile du testateur, ou encore la localisation de ses biens.
Parmi les 13 États parties figurent : la France, les États-Unis, le Canada, la Belgique, l’Italie, la Libye, le Niger, le Portugal, la Slovénie, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la République tchèque et la Slovaquie.
Attention : certains pays ont signé la Convention mais ne l’ont pas encore ratifiée, comme le Royaume-Uni, la Russie ou la Chine.
Si votre pays d’expatriation fait partie de ces États, l’option d’un testament international devient possible et pertinente.
Dans un tel cas, il vous sera possible de rédiger votre testament international en France ou dans votre nouveau pays de résidence ayant ratifiée la Convention. Si, pour des raisons personnelles, vous souhaitez rédiger un testament international dans chacun des deux pays, il vous faudra être attentif à confirmer l’un avec l’autre et à ne pas les révoquer mutuellement lors de leur rédaction.
Attention : si vous insérez la formule « Je révoque toutes dispositions antérieures à ce jour », seul le dernier testament rédigé sera valable.
1.3 Les pays non signataires des deux Conventions
Si le pays dans lequel l’expatrié réside ne figure sur la liste d’aucune des deux conventions précitées, il est recommandé de rédiger le testament en conformité avec le droit local.
Pourquoi ? Parce que la France reconnaît en principe les testaments rédigés à l’étranger, mais la réciproque n’est pas garantie. Ainsi, un testament rédigé en France pourrait ne pas être reconnu dans le pays d’accueil.
2. Les conséquences de l'absence de testament
L’absence de testament pour un non-résident peut entraîner des conséquences significatives :
Application du droit successoral du pays de résidence ou du pays d’origine : en l’absence de dispositions claires, le droit applicable peut être celui du dernier domicile du défunt ou celui du pays de localisation des biens.
Conflits entre héritiers : une absence de testament peut engendrer des litiges familiaux, notamment si les règles successorales diffèrent d’un pays à l’autre.
Fiscalité accrue : certains pays appliquent des droits de succession élevés aux héritiers étrangers. Une planification testamentaire permet d’optimiser cette charge fiscale.
Blocage des actifs : sans testament reconnu, les héritiers peuvent rencontrer des obstacles administratifs pour accéder aux biens du défunt.
Conclusion
Pour un non-résident, la rédaction d’un testament est une démarche incontournable afin d’assurer une transmission harmonieuse de son patrimoine. Le choix de la forme, la prise en compte des conséquences juridiques et fiscales, ainsi que l’anticipation des conflits éventuels doivent guider cette planification.
Il est vivement recommandé de consulter un notaire expert en droit international pour garantir la conformité et l’efficacité du testament en fonction des juridictions concernées.